À l’ouverture de l’atelier spécial de haut niveau, mardi 9 septembre 2025 à Lubumbashi, entreprises minières, société civile, chercheurs et autorités se sont affrontés autour d’un sujet brûlant : l’envahissement des périmètres concédés par des exploitants artisanaux. Entre pertes financières, risques sécuritaires et revendications sociales, le débat a mis en lumière l’urgence d’un cadre juridique et opérationnel partagé.
Des entreprises minières alarmées par les intrusions
Les représentants des sociétés minières ont dressé un tableau alarmant des conséquences des occupations illégales. Hugo Sinza, de Tenke Fungurume Mining, a cité des pertes de production chiffrées à 18 000 $ par mois imputables à l’exploitation artisanale illégale, ainsi que de multiples actes de vandalisme visant les installations. « Nos activités sont continuellement interrompues par des groupes non autorisés. Cela crée des tensions et paralyse notre production », a t il expliqué.
Les entreprises dénoncent notamment :
• des retards dans les opérations d’extraction ;
• la dégradation et le sabotage d’équipements ;
• des risques accrus d’accidents et d’insécurité pour le personnel ;
• des contraintes logistiques et des surcoûts opérationnels.
Appel à l’État : sécuriser et régulariser
Face à ces menaces, les miniers ont lancé un appel pressant à l’État pour renforcer la sécurisation des périmètres concédés. Ils préconisent aussi la création et la mise en œuvre effective de zones d’exploitation artisanale (ZEA) clairement délimitées et encadrées, afin de concilier activité artisanale et exploitation industrielle sans heurts.
Points de vue scientifiques et sociaux
Le professeur Kaniki, chercheur, a appuyé l’analyse des entreprises en soulignant que l’exploitation artisanale non encadrée augmente significativement les risques sécuritaires et ne profite pas aux opérateurs industriels professionnels. Selon lui, l’absence d’encadrement formel favorise l’illégalité et la violence sur les sites.
À l’inverse, les creuseurs et leurs porte parole ont rappelé leur précarité et leur droit à la survie. David Kitwa, issu du milieu de l’artisanat minier, a dénoncé le non respect des engagements des autorités, notamment la mise en place tardive ou incomplète des ZEA prévues par le Code minier. Il a appelé à des solutions qui prennent en compte la dimension sociale et économique de l’artisanat.
Vers une cohabitation légale et encadrée
Pour maître Jean Claude Katende, la réponse doit être équilibrée : « Il faut une cohabitation claire, légale et respectueuse des règles. » Il a insisté sur la nécessité de faire appliquer la loi relative à l’artisanat minier et, le cas échéant, de revoir certains textes pour harmoniser le secteur et prévenir les conflits.
Parmi les propositions formulées pendant le panel figurent :
• la mise en place effective et rapide des ZEA ;
• des programmes de dialogue communautaire et de médiation locale ;
• des mécanismes de surveillance et de sécurisation partagée entre entreprises et autorités ;
• des dispositions pour compenser les communautés et prévenir l’exclusion économique.
Obstacles à l’application des solutions
Malgré ces propositions, les intervenants ont pointé la lenteur des réponses publiques, la complexité des tensions sociales sur le terrain et le manque de ressources institutionnelles pour assurer une mise en œuvre rapide et durable. Les entreprises estiment que, tant que l’envahissement artisanal restera non encadré, le secteur sera fragilisé, les investissements découragés et la sécurité compromise.
Le débat de Lubumbashi a mis en évidence un dilemme réaliste : concilier la nécessité de protéger les infrastructures et les investissements industriels avec l’impératif social de garantir des moyens de subsistance aux populations locales. La mise en place opérationnelle et transparente des ZEA, associée à un renforcement des mécanismes de gouvernance et de contrôle, apparaît comme la seule voie pour transformer conflits et pertes en opportunités de développement partagé.
Trésor Kasamba